PHILO ET LES VOIX DU TAMBOUR
PHILO ET LES VOIX DU TAMBOUR
Philippe Gouyer-Montout, dit Philo, appartient au nombre des véritables héritiers du tambour traditionnel martiniquais, au son duquel il a évolué dès son plus tendre âge. Tôt initié au tambour bèlè et en particulier à sa branche martiale – le danmyé –, le chevronné percussionniste, chanteur, conteur, compositeur et auteur n’a pas manqué de s’intéresser aussi au tambour guadeloupéen gwoka. Et il s’est naturellement pris d’amour pour le jazz, dont l’essentiel vivier – la Nouvelle-Orléans – est géographiquement plus proche des Antilles que de Paris. « Je développe une vision du bèlè, non pas excluante, mais résolument ouverte, explique-t-il. Au bèlè, socle de mon projet Lanzdifou, j’intègre d’autres composantes caribéennes, gwoka, jazz, éléments de nos racines africaines… ». En qualifiant sa musique « d’afrobeat de la Caraïbe », il adresse un clin d’œil au légendaire Nigérian Fela Anikulapo Kuti, activiste panafricaniste et concepteur, avec le batteur Tony Allen, de l’afrobeat. Plutôt que l’usuel binôme basse-batterie, il a opté pour le tandem rythmique basse-tambour, qui enfonce le clou d’un envoûtant groove créole.
Le bèlè, un trésor de notre patrimoine national
Né en 1976 à Fort-de-France, Philo a grandi à l’Anse Dufour, hameau au Sud-Ouest de son île natale. Il fait partie de l’ultime génération qui a connu, en chair et en son, le bèlè à l’époque de sa splendeur, avant que celui-ci ne subisse les conséquences, d’une part, des crises sucrières des années 1950-1960 et, d’autre part, de la politique migratoire lancée en 1963 par le gouvernement français via le BUMIDOM (Bureau pour le développement des migrations des départements d'Outre-mer). Les campagnes se sont peu à peu vidées et, de facto, la pratique du tambour s’est affaiblie. Retiré, le village de Philo a été préservé de cette rupture de transmission culturelle. Grâce au mouvement de renaissance surgi durant la décennie 1970, le legs des ancêtres esclaves n’a pas sombré dans l’oubli. Le bèlè que défend Philo constitue un trésor de notre patrimoine national. Il nous incombe, à toutes et tous de lui accorder une attention à la mesure de sa richesse culturelle et artistique.